Grenelle de l'Environnement : ca va faire pshiiiit !

Publié le par Benoit PETIT

grenelle-environnement-mai-2007.jpg

Credit photo : M. KLEIN (c) Services photographiques de la Présidence de la République



Grenelle de l'Environnement : ca va faire pshiiiiiiit !


Ca discute sévère, en ce moment dans le monde de l'écologie : chacun cherche à se faire un avis sur ce nouveau bidule : le Grenelle de l'Environnement... Faut-il y croire ? ou pas ? Et toi, t'en penses quoi ? L'on s'interroge, l'on s'envoie des mails, l'on s'en parle in extremis avant de raccrocher... ben ouais ! on sait plus trop où l'on va, à vrai dire.

D'abord, on a tous envie d'y croire, quand même ! Depuis le temps que nous réclamons une remise à plat des politiques environnementales avec l'Etat, les collectivités, les associations, les experts, les médecins etc... là, c'est l'occasion idéale ! Rendez-vous compte, un Grenelle de l'Environnement... c'est un nom plein de promesses. 

Mais dans le même temps, l'on n'oublie pas le passé, et encore moins le présent. On nous a tellement menti, roulé dans la farine et trahis que maintenant, nous sommes devenus presque sceptiques par nature. Des sujets à mettre sur la table, y en a des centaines ! Tous aussi urgents les uns que les autres... des courriers, on en a envoyé des millions ; des pétitions, on en a signé des pages ; des débats publics, on en a tenu des heures et des heures ; des rapports, on en a plein nos étagères ; et surtout, des procédures, nous en avons mené tellement ! Alors oui, nous avons le droit d'avoir des doutes sur l'efficacité de ce Grenelle... car c'est plus qu'une rupture dont l'environnement a besoin dans ce pays, c'est une révolution culturelle !!

Pensez ce que vous voulez de ce machin, mais personnellement, je n'en attends rien... mais alors, vraiment rien. Je commencerais à croire que les choses ont changé dans ce pays uniquement lorsque la décision sera prise de renoncer définitivement au projet d'incinérateur de Fos-sur-Mer ; lorsque nos députés voteront le moratoire sur les OGM, l'EPR et les constructions d'autoroute ; lorsque la loi conduira les producteurs et distributeurs à intégrer les coûts sociaux et environnementaux dans les prix ; etc... etc... etc...

Pour l'instant, tout ce que je vois c'est une énième mascarade médiatique qui m'attriste :

Alain Juppé qui tient conférence de presse dans les beaux jardins verdoyants de la République... et qui nous annonce d'entrée de jeu qu'il entend poursuivre la construction de centrales électro-nucléaires.. Message reçu 5 sur 5, le Grenelle de l'Environnement ne fera pas obstacle au rachat d'AREVA par Bouygues (l'ami du Président), n'annulera pas non plus la construction de l'EPR à Flamanville...

Et pour ceux qui n'auraient vraiment pas compris le message, le Réseau "Sortir du Nucléaire" n'était même pas invité à participer à la première réunion de préparation du bidule... ce qui n'avait pas l'air de tracasser Nicolas Hulot.

Ce même Nicolas Hulot qui lui, tenait conférence de presse dans les belles cours caillouteuses de la Républiques... et qui nous explique que jamais, o grand jamais, il n'avait senti autant d'ouverture d'esprit de la part d'un Président de la République et de son gouvernement... mieux que Chirac ? alleeezzz... c'est vrai que je me sens d'un coup plus rassuré !

Mais en même temps, ils étaient bien obligés de concéder que certains sujets s'annonçaient déja comme des "points durs" : les OGM, les incinérateurs, la politique agricole, l'énergie... bref, les deux-tiers des dossiers urgents... pour une première réunion où soit disant tout le monde est super "open" et volontaire, ca laisse pantois.

Je vais vous dire, ce Grenelle de l'Environnement, en réalité, ce n'est rien d'autre que la consécration de l'écologie hulotiste... c'est-à-dire l'écologie médiatique, light, et agréée par l'UMP. 

Qu'est-ce que l'écologie hulotiste précisemment ? La conviction que les enjeux environnementaux prioritaires (à l'exclusion de tous les autres) sont le changement climatique et la biodiversité (parce que ce sont les sujets les plus médiatisés) ; et qu'avec du nucléaire et quelques bidouilles fiscales, l'on va tout arranger fissa.

C'est aussi et surtout (et c'est mon avis personnel) la tentative de museler les ONG environnementales dans leurs actions contre les lobbies "amis du pouvoir", en leur imposant un leader (Hulot) qui se fout totalement des combats écologistes (sauf la biodiversité et le réchauffement climatique) et qui par conséquent, ne viendra pas géner certains intérêts bien en place...

Alors même si je n'y crois pas du tout, à votre Grenelle de l'Environnement, je vous en supplie MM. Juppé, Hulot & Co, faîtes moi mentir... montrez moi que je me suis trompé sur toute la ligne dans ce post... étonnez moi !! 

En attendant, l'incinérateur de Fos-sur-Mer est toujours en cours de construction... et le Préfet qui l'a imposé aux populations est nommé directeur de cabinet d'Alain Juppé...
 

Publié dans Archives

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
E
Benoît, <br /> <br /> Mon dernier commentaire te laisse apparement bien perplexe... et silencieux...<br /> <br /> Peut-être te chatouille-il un peu trop sur ce qui fonde le Droit?<br /> <br /> C'est pourtant sauf erreur le fond du problème, si l'on souhaite agir sur les causes des désastres écologiques en cours sans en rester à la surface, du phénomènologiquement observable ou des soubresauts politiciens, écume sur la mer qui ne dit rien de ses mouvements et de l'effet du vent qui la produise...
Répondre
E
Benoit,<br /> <br /> Nos analyses divergent en ce point précis.<br /> <br /> L'économie n'est qu'une "science" appliquée ds l'interférence d'une sociologie et d'une axiologie dans sa partie naturelle, c'est à dire la valeur qui n'est qu'une fonction naturelle en nous de non indifférence entre deux projets, exactement comme l'âne de Burridan finit tjs par choisir entre son seau d'eau et sa botte de foin; sociologie au sens dialectique qui permet de constater en quoi nous sortons de la grégarité pour émerger politiquement à l'histoire de façon conservatrice ou progressiste; et en évitant les pathologies style perversions et psychoses.<br /> (Soit une science qui n'a plus rien à voir avec les bidouillages statisques, je veux dire, ce n'est pas d'employer les mathématiques qui rend la sociologie scientifique - idem pour l'économie)<br /> Il ne faut donc de mon point de vue rien attendre de l'économie, mais reconnaitre qu'il va falloir qu'elle soit surplombée(contrôlée)<br /> par une gestion de la moralité en lieu et place de la gestion de la valeur, soit passer à une légalisation (institutionnalisation) des processus minimaux de légitimation en chacun. Le marché, c'est tjs qq'un qui tire les ficelles et normalement doté, et de cette faculté d'émergence à l'histoire, et d'une émergence à la vertu.<br /> <br /> Pour reprendre les choses autrement, la sociologie et l'axiologie telles que je les entend sont dialectiques, un pôle naturel, un autre formel (sans contenu positivable), et par réaménagement de cette contradiction entre les deux, le pôle phénomènologiquement obsevable ou culturel; sans qu'il n'y ait de point fixe isolable quelque part.<br /> L'interférence de notre socialité (faculté) avec la fonction naturelle de valorisation donne l'économie. L'interférence de cette même socialité avec la faculté axiologique (ce droit par lequel nous légitimons nos désirs-envies naturels) corespondante donne l'hégétique.<br /> <br /> Comment construire scientifiquement cette hégétique? Il suffit de parvenir à instituer des dispositifs qui vont permettre de mettre en echec les psychopathes (inverse des névrosés), jusqu'à permettre de les opposer deux à deux: ce que l'un conserve encore dans sa capacité d'abstinence éthique est impossible à l'autre, et réciproquement. A partir d'une multitude de telles mises en situations instituées, il deviendra alors loisible de constater qui est moralement apte à prendre des décisions pour autrui quel qu'en soit le domaine, donc éviter ainsi 'a priori' tous les phénomènes de prévarication concussion et autre effet de lobbying.<br /> <br /> Tu trouveras une première application de l'usage de la théorie sous-jacente chez Jean-Michel Lebot "Du Dvlpt durable au bien public" (L'harmattan 2002) bien que j'ai une réserve sur sa façon de comprendre justement l'interférence en question (p260-261), tout simplement parce que nous avons un mal de chien à valider ici les 2 modèles dialectiques homologues, alors d'une part qu'ils 'marchent' ailleurs, et que je n'ai pour l'instant trouvé qu'une application dont le résultat est de pulvériser les trois principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution ( Nicolas de Sadeleer) en les intégrant ds mon même dispositif avec le résultat intermédiaire plus haut (effet diagnostic).(2 items ne suffisent pas non plus à valider un modèle!)<br /> <br /> Qt à l'effet retour en arrière historique, il faudrait plutôt de mon point de vue remonter jusqu'à La Renaissance qui a vu émerger la technoscience expérimentant la nature, et qui a vu un basculement des frontières de la socialité: de l'appartenance de classe des seigneurs et des manants, par le sang, à celle de la naissance sur un territoire ou un sol encadré par des frontières géophysiques. S'il y a tjs frontière elles ont changé de nature, exactement comme elle sont encore en train de le faire sous nos yeux. Les nouveaux seigneurs, de l'industrie ou du capital, n'ont plus besoin que d'une golden card et d'un passeport sans être assignable en un point précis.<br /> <br /> Finalement, vous avez de la chance, en même temps qu'émergent les problèmes (écologiques entre autre mais pas seulement) émerge aussi le faisceau de solutions , au moins en théorie; la course de vitesse est donc lancée entre les conservateurs (idéologies de gauche et de droite , je te donne encore raison sur ce point) et la révolution orange. Ma seule différence importante avec Bayrou et Corinne en dehors du fait que le 1er a réuni 6,8 de votes sur son nom tient au fait que là où ils avancent avec l'instinct du bon sens et des intuitions pertinentes, j'essaie avec les moyens du bord de faire disparaitre l'idée d'opinion. Personne n'aurait l'idée de contester un diagnostic de varicelle ou d'appendicite, pourquoi n'en irait-il pas de même pour l'aptitude au pouvoir sur autrui? (!!!) <br /> <br /> A+
Répondre
B
Tout à fait d'accord... tant que l'écologie sera enfermée soit dans la doctrine néoclassique, soit dans la doctrine neomarxiste, elle sera cantonnée à un rôle de "correcteur a posteriori des dérives économiques".<br /> <br /> Si l'on veut que l'écologie intervienne en amont, c'est à dire entant que moteur et aiguillon de l'économie, nous devons réinventer une doctrine économique différente. <br /> <br /> Effectivement, Corinne a raison lorsqu'elle dit que l'écologie politique est dans la meme situation que le socialisme au XIXe siècle... en quête d'une doctrine économique rigoureuse spécifique.
Répondre
E
Benoit,<br /> Globalement d'accord avec ton analyse. La question est donc: "comment sortir de la toute puissance de ce foutu principe de réalité économique qui sert de logiciel de décision incontournable aux décideurs de cette planète dès qu'ils parviennent à un poste de pouvoir quelconque?"<br /> <br /> Faute de solution opératoire pour mettre ce principe à distance, l'humanité aura toujours un coup de retard sur cette gouvernance du monde. Et s'imaginer qu'on puisse refonder l'écologie politique en évitant cette question fondamentale ne sera qu'une perte de temps supplémentaire.
Répondre
B
Justement, Alexis... pendant que tu espères qu'ils réussiront, moi je désespère des premiers actes concrets... la nomination de FREMONT ne te pose donc aucun problème sur la thématique des incinérateurs ?
Répondre