Plan de redressement de l’assurance maladie : Roselyne Bachelot récidive... !

Publié le par Benoit PETIT


 




(En marge du sujet de mon post : y en a marre que TOUS nos ministres fassent la pub pour l'album de Carla Bruni-Sarkozy... nous prend-t-on à ce point pour des moutons imbéciles ?)


Elle fut un ministre catastrophique pour l’environnement sous Chirac. Elle est un ministre tout aussi catastrophique pour l’assurance maladie sous Sarkozy. Rien ne résiste à Roselyne Bachelot ! Son « truc » à elle, c’est la « déconstruction méthodique » de ce dont elle a la charge… et l’annonce, ce mardi, de son Plan d’économie pour l’assurance maladie vient une nouvelle fois confirmer ce constat amer.

 

Certes, le dossier n’est pas simple (il ne l’a d’ailleurs jamais été) : les comptes de l’assurance maladie seront une nouvelle fois déficitaires - de 4,1 milliards d’euros pour 2008 selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale -  et si l’on prend en considération des facteurs tels que le vieillissement de la population, l’augmentation des affections dues aux pollutions, les coûts croissants du progrès médical ou encore la baisse du nombre des cotisants (pour ne citer que ceux-là), il y a tout lieu de craindre que la situation financière s’aggravera considérablement ces prochaines années. Il faut donc sauver l’assurance maladie… la question reste : comment ?

 

Jusqu’à présent, plusieurs « méthodes » ont été tentées pour « sauver » l’assurance maladie, et notamment la culpabilisation des patients (système du médecin-traitant) et la contribution des malades (les franchises médicales). Cette fois, Roselyne Bachelot innove (du moins, en apparence) : puisque l’on ne peut plus ponctionner directement le portefeuille des Français – crise du pouvoir d’achat et mauvais sondages présidentiels obligent – autant le faire le de façon indirecte et plus discrète, en faisant passer les mutuelles à la caisse ! L’idée de (mauvais) génie du ministre est simple : créer une taxe sur le chiffre d’affaire des complémentaires, et récupérer par ce biais 1 milliard d’euros de ressources supplémentaires pour la couverture de base.

Il faut croire que la progression de 48,2% du chiffre d’affaire du secteur ainsi ciblé (progression enregistrée entre 2001 et 2006) n’est pas passée inaperçue avenue Duquesne. La bonne santé financière des mutuelles (puisqu’il s’agit d’elles, essentiellement) suscite l’envie et la convoitise. Dommage que personne au cabinet du ministre se soit demandé pourquoi elles marchent aussi fort (pour s’en inspirer).

 

Soyons clairs. Non seulement la ficelle est facile, mais elle est dangereuse. Pour les Français d’abord, car qui dit taxe supplémentaire sur un opérateur privé, dit risque d’augmentation des cotisations. Roselyne Bachelot a beau nous endormir avec ses paroles faussement rassurantes (« il n’y a jamais de certitudes, mais il n’y a aucune raison qu’elles augmentent leurs cotisations »… ben voyons, 1 milliard d’euros de surcout pour le secteur, ce n’est pas une raison suffisante ?!), les premiers concernés ont d’ores et déjà annoncé la couleur : pour les opérateurs assurantiels – et particulièrement le Directeur technique santé d’Axa – « le secteur répercutera cette taxe sur la facture des clients » ; pour les mutuelles - qui relèvent de l’économie sociale, et qui n’ont pas d’actionnaires - « on va tout faire pour essayer de ne pas répercuter, cette année, cette taxation nouvelle » (comprenez : on verra déjà ce que l’on peut faire pour 2009, mais c’est loin d’etre gagné)… Les fins de mois s’annoncent plus rudes qu’elles ne le sont déjà. Les couvertures complémentaires santé vont progressivement devenir un produit de luxe pour une bonne partie des Français, dont les faibles revenus supportent déjà l’augmentation des carburants et des produits alimentaires, ainsi que les loyers et les crédits immobiliers. Bravo Mme Bachelot !

 

Pour l’équilibre structurel des couvertures santé ensuite, car les mesures de redressement annoncées vont handicaper lourdement les mutuelles, notamment dans leurs politiques d’investissement et de développement. A la différence des compagnies d’assurance, leurs profits ne sont pas redistribués aux actionnaires (puisqu’elles n’en n’ont pas ; ce sont les adhérents, c’est-à-dire vous et moi, qui gèrent ces entreprises directement au travers les Assemblées générales) ; les excellents résultats qu’elles obtiennent sont donc normalement intégralement réinvestis soit dans le recrutement de personnels, soit dans l’élaboration de nouveaux produits santé performants, soit encore dans la baisse des cotisations. Autant de décisions bénéfiques pour les Français qui sont aujourd’hui compromises par notre ministre.

L’économie sociale est la clé de voute d’un système moderne, efficace et juste d’assurance maladie. Elle permet d’impliquer directement le citoyen dans la gestion de ses couvertures (et donc de le responsabiliser intelligemment) ; elle est vectrice d’une éthique marchande qui fait cruellement défaut de nos jours ; elle est moteur d’une approche « développement durable » des problèmes de santé. Alors pourquoi le gouvernement ne leur fiche pas une paix royale, et ne les laisse pas prospérer tranquillement ? Il en va de l’intérêt social national !!

 

J’entend déjà les sarkoziste nous dire : on ne peut pas faire autrement, il faut parfois consentir des efforts pour sauver le système (et dire qu’ils nous ont tanné pendant des mois avec leur prétendue « rupture »). Faux ! Ce ne sont que des sornettes politiciennes que l’on distille pour faire passer la pilule.

Déjà, avant de taxer les mutuelles, on pourrait a minima écouter leurs analyses et entendre leurs propositions. Et ce qu’elles nous disent est simple : on ne peut plus gérer l’assurance maladie du XXIe siècle avec des solutions et des méthodes qui ont été élaborées dans les années 1940-1970.  A savoir un financement assis essentiellement sur des cotisations salariales (surtout en situation de crise de l’emploi, réelle quoi qu’en disent les chiffres bidouillés du chômage), une gestion complexe assumée par les partenaires sociaux et l’Etat, une dynamique de réduction constante des prestations, une politique toujours plus favorable aux médecins… Il faut se rendre à l’évidence : le système dans son ensemble est conçu comme une machine à produire des déficits et de l’injustice sociale et sanitaire. Il serait temps que nous pensions à une refonte complète de l’organisation de notre protection sociale.

Ensuite, à vouloir taxer quelqu’un, nous pourrions taxer davantage ceux dont l’activité génère directement ou indirectement des coûts sur la santé : les pollueurs (type BTP, industrie nucléaire, constructeurs et gestionnaires d’incinérateurs, producteurs de tabacs, OGM, pesticides, alcools, etc… la liste est longue), l’industrie pharmaceutique (qui nous pond des médicaments très chers, et pas forcément utiles au plus grand nombre), ceux du corps médical qui abusent de leurs prérogatives (ordonnances excessives, notamment)…

Enfin (mais les propositions ne se limitent pas à ces trois idées de pur bon sens), il est plus que temps d’initier dans notre pays, une véritable politique de prévention des risques, doublée d’une politique de précaution. Les écologistes ne le répèteront jamais assez : la seule manière réellement efficace de réduire les coûts collectifs induits par les problèmes que nous rencontrons, c’est de les éviter. Les « spots » publicitaires de « sensibilisation » ne suffisent pas. Il faut que le politique s’investisse directement, en étant capable de dire non à des projets dont nous savons d’avance qu’ils vont aggraver la santé de nos concitoyens (n’est-ce pas MM. Gaudin et Préfet des Bouches-du-Rhone, grands promoteurs de l’incinérateur de Fos ?).

 

Il n’y aura aucune conclusion à mon post. Le débat est ouvert, et nous sommes toujours en attente d’une « rupture » qui ne vient pas… et qui, je le crains, n’est pas prêt de venir tant que Roselyne Bachelot sera aux manettes de l’assurance maladie. En attendant, je ne peux que vous inciter à soutenir le combat de la Mutualité française. Heureusement qu’en France, il reste encore des acteurs compétents en matière de santé ; j’espère qu’il reste également des gens capables de s’indigner et de se mobiliser pour protéger ces derniers…

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