G20 : le mythe du nouveau capitalisme

Publié le par Benoit PETIT


Accord mondial<br/>pour un nouveau capitalisme<br/>


Parait-il que depuis ce soir, le monde est entré dans une nouvelle ère. Le G20 aurait en effet tenu toutes ses promesses - les partisans de la "relance" obtenant 1000 milliards de dollars, les partisans de la "régulation" obtenant leur fameuse liste noire des paradis fiscaux - et déjà, un consensus médiatico-gouvernemental s'est constitué pour répandre la bonne parole : à les entendre, la crise sera bientot de l'histoire ancienne, et c'est un capitalisme inédit, plus éthique et plus humain, qui aurait émergé des cendres du précédant. Ben voyons !

Certes, il faut rendre aux Césars du monde ce qui leur appartient. Le "G20" a effectivement acté des avancées majeures, dont la plus remarquable est, sans doute, la réforme du FMI (accroissement de ses ressources, et possibilité pour les non-Européens et non-Américains d'accéder aux responsabilités de direction). "Ils" auront au moins intégré l'idée qu'aucune résolution de la crise n'est envisageable sans écoute et sans implication des pays en voie de développement et des pays pauvres. C'est déjà, en soi, une petite "révolution", meme si l'on peut regretter que le "G20" de septembre prochain ne sera pas, justement, ouvert à tous ces pays (faut pas déconner, tout de meme)... clairement, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant de reconnaitre au "Tiers Monde" toute sa place sur la scène internationale. Mais un mini-pas a malgré tout été franchi.  
Il faut également saluer les efforts de nos gouvernants visant à renforcer les contraintes éthiques sur les paradis fiscaux, les hedgefunds, les agences de notation et les rémunérations des acteurs de la finance... meme si personne n'est dupe sur le fait que les abus ne disparaitront évidemment pas d'un coup d'un seul, par l'effet d'une stigmatisation mondiale généralisée. Du reste, on reste un peu sur notre faim face à la très grande imprécision des mesures concrètes envisagées. On aurait sans doute préféré entendre la création d'une Justice financière internationale, dotée de réels pouvoirs d'investigation et de sanctions, mais déjà que le monde n'arrive pas à s'entendre sur une Cour Pénale internationale, nous devrons nous contenter de ces tous petits progrès en terme de régulation. Bah : un petit mieux vaut plus qu'un grand rien-du-tout.

Mais tout de meme, de là à titrer "Un accord mondial pour un nouveau capitalisme" (Le Figaro), on est pas loin de prendre les gens pour des imbéciles (ou, en langage plus diplomatique, "des temps de cerveau disponibles"). Car aucun des fondements du capitalisme actuel n'a été réformé : ni la gouvernance, ni les principes qui commandent l'OMC ; pas plus les pratiques du néo-colonialisme économique auquel se livrent les grandes multinationales françaises, européennes, américaines, chinoises, russes etc... sur l'Afrique, l'Amérique du sud ou l'Asie ; pas un mot sur la refonte des normes comptables au plan international, ni sur l'émergence de nouveaux indicateurs de richesse qui prennent en compte les paramètres sociaux et écologiques ; quid, justement, des questions sociales, sanitaires et environnementales ? Les 20 ont-ils seulement évoqué les enjeux de la "Responsabilité sociale des entreprises", des fonds d'investissement éthiques et socialement responsables ? Ont-ils envisagé une-demie seconde de repenser les paramètres qui permettent d'établir les prix des biens et services, notamment en intégrant les couts sociaux et environnementaux externes ?
Bien sur que non. Il n'y a aucun "nouveau capitalisme" en vue, seulement un "replatrage", certes nécessaire mais dont les effets seront limités à simplement calmer le jeu de la crise financière.

Du reste, mettre en place un nouveau capitalisme ne peut se faire comme celà, entre 20 dirigeants et en 24 heures chrono. On pourra éventuellement y croire le jour où l'ensemble de l'ONU se saisira du problème, en commençant d'abord par se réformer elle-meme et en se dotant d'une véritable posture de "Gouvernement mondial". D'ici là...

Prenons ce que les 20 nous donnent aujourd'hui. C'est toujours celà de gagné, meme si c'est très peu par rapport à ce que les citoyens du monde réclamment. Mais par pitié, ne nous laissons pas endormir par les discours fabriqués par leurs experts en communication, qui voudraient nous faire croire qu'un autre Monde est né. Ce n'est évidemment pas la vérité, et demain, comme aujourd'hui et comme hier, les classes moyennes et populaires continueront à subir les abus du capitalisme contemporain.
Gardons nous également de céder aux sirènes des "anti-capitalistes" qui, meme s'ils mettent exactement le doigt sur les dysfonctionnements du système, ne proposent aucune alternative crédible, viable et humainement acceptable. L'anticapitalisme est le pendant naturel du capitalisme actuel, son frère siamois qui empeche toute évolution intelligente du système, l'un et l'autre s'alimentant respectivement pour maintenir un équilibre qui satisfait leurs intérets réciproques.

Un autre capitalisme est effectivement envisageable, mais en tout état de cause, nous sommes loin de disposer des outils élémentaires qui permettent de passer de la théorie à la pratique. La volonté politique de nos gouvernants est insuffisante. Surtout, la Démocratie mondiale, unique préalable à l'émergence d'un nouveau capitalisme humain, éthique et écologique, reste encore une utopie... mais une très belle utopie pour laquelle militer !



PS : Coup de gueule particulier au Gouvernement Français qui s'est si facilement laissé convaincre par la Dictature chinoise de laisser tomber le Peuple du Tibet... quand la Démocratie et les Droits de l'Homme deviennent une monnaie d'échange contre des mensonges économiques... bon, on était déjà habitués à ce type de politique (cf. les ventes de nos Airbus et de nos centrales nucléaires), mais là, la France a dépassé des limites qui sont indignes de son Histoire humaniste !!


http://www.tibet-info.org/Agir/drapeau/DRAPTIBETA3.JPEG

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